ISHKERO

L'Astrada de Marciac, jeudi 27 juillet 2023

Texte : Annie Robert / Photographies : Laurent Sabathé

Ishkero à l'Astrada de Marciac, jeudi 27 juillet 2023. Photographie © Laurent Sabathé
Ishkero à l'Astrada de Marciac, jeudi 27 juillet 2023. Photographie © Laurent Sabathé
Adrien Duterte; Ishkero, jeudi 27 juillet 2023, l'Astrada de Marciac. Photographie © Laurent Sabathé
Adrien Duterte; Ishkero. L'Astrada de Marciac.

Que voilà un groupe qu'il est balèze !

 

Balèze dans le gros son, les crescendos épiques, des vertiges déjantés. Il fait dans le solide, le rentre dedans et l'énergie à fond. C'est un beau rendez-vous que le leur.

 

Mais ces trentenaires ne sont pas des perdreaux sortis du nid pour autant. Cela fait dix ans qu'ils peaufinent, qu'ils tracent leur route, qu'ils essayent, réessayent et inventent, affinent leur jazz progressif, se frottent aux autres, multiplient les résidences, bref se donnent les moyens de faire émerger une belle cohérence d'équipe, un collectif soudé et réfléchi. Et ça marche.

Tao Ehrlich; Ishkero, jeudi 27 juillet 2023, l'Astrada de Marciac. Photographie © Laurent Sabathé
Tao Ehrlich; Ishkero. L'Astrada de Marciac.

Avec cette solide constance, Ishkero est devenu en quelques années un groupe qui compte dans la jeune scène française (lauréat du tremplin ReZZo du festival Jazz à Vienne en 2021, et lauréat Jazz Migration en 2022... pas mal !). Ishkero sort en effet cette année un premier long format intitulé « Shama ».

 

Et sur cette nouvelle scène française de fusion instrumentale, Ishkero se démarque par une signature originale qui atteste leur différence, la flûte, un ludion délicat et inspiré. Peu utilisée dans le jazz progressif, plutôt confinée aux gazouillis charmeurs, elle prend une place de choix chez eux, défend les thèmes et donne au groupe une couleur particulière par le contraste qu'elle apporte avec la puissance apparente des autres instruments.

Arnaud Forestier; Ishkero, jeudi 27 juillet 2023, l'Astrada de Marciac. Photographie © Laurent Sabathé
Arnaud Forestier; Ishkero. L'Astrada de Marciac.

Le visuel qui les accompagne sur scène est à l'unisson de leur musique: coloré, tournoyant et chaleureux.

 

Leur son de groupe, dont le jazz est l’élément sous-jacent essentiel, privilégie une énergie sauvagement rock, soutenue par une section rythmique impeccable qui tient de bout en bout une cadence infernale, toujours tendue vers l'avant. Boucles, pédales, réverbérations, distorsions font partie de leur paysage musical et s'y étalent avec naturel. Ils en tirent bien des profits mais n'oublient rien de ce qui constitue le jazz, des solos ciselés, des impros actives. Les curseurs sont poussés à fond mais toujours collectivement, et toujours de façon travaillée. C'est fort certes, mais c'est finement bossé ! Et dans ce parti pris de musique presque physiologique, c'est un bel exploit que de renouveler les interactions et les formules, d' arriver à casser les codes, d'être audibles avec une telle masse sonore.

Victor Gasq; Ishkero, jeudi 27 juillet 2023, l'Astrada de Marciac. Photographie © Laurent Sabathé
Victor Gasq; Ishkero. L'Astrada de Marciac.

Le moment en trio qu'ils nous offrent – basse – batterie – claviers - est des plus percutants avec un son pleine puissance, bien poussé dans les cordes. La balade commencée sur des fils de soie se termine en saut à l'élastique, au bord du vide.

 

D'ailleurs, il en sera de même avec le morceau suivant : départ avec une flute délicate, et un battement sourd à la basse, des ruptures et des arrêts et des nappes sonores qui débordent comme une crue de fleuve, s'insinuant partout.

 

On est dans une expérience physique plus que narrative. C'est aussi ce qui caractérise leur musique : ce rapport très primal au son, cette non recherche (qui se défend) d'une musique non littéraire, pour se laisser porter vers les sonorités et leurs interactions.

Adrien Dutertre; Ishkero, jeudi 27 juillet 2023, l'Astrada de Marciac. Photographie © Laurent Sabathé
Adrien Duterte; Ishkero. L'Astrada de Marciac.

Du coup, il y a peut- être à mon goût des rendez-vous qui manquent un peu, des dialogues qui pourraient davantage se faire entendre entre guitare et flûte, flûte et claviers, par exemple, des impros qui pourraient s'allonger.

 

Leur musique très terrestre, très physique pourrait parfois se payer une tranche de ciel...

 

Mais peut-être que le prochain sillon qu'ils vont tracer sera celui-là... ou pas...

 

Dans tous les cas, un groupe à suivre, un groupe pressé (à tous les sens du terme) qui en a, sans aucun doute, encore beaucoup sous les pédales !

Ishkero à l'Astrada de Marciac, jeudi 27 juillet 2023. Photographie © Laurent Sabathé
Ishkero à l'Astrada de Marciac, jeudi 27 juillet 2023. Photographie © Laurent Sabathé

Adrien Duterte, flûte / Tao Ehrlich, batterie / Victor Gasq, guitare électrique

Arnaud Forestier, Fender Rhodes / Antoine Vidal, guitare basse

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