Les P'tiZZamis de Jazz360
« Maîtrise parfaite de l’instrument, un son puissant et précis, une approche harmonique élégante, bien enracinée dans la tradition du jazz et pourtant résolument moderne, un phrasé exubérant et racé, posé sur le groove avec une précision d’orfèvre… Ce garçon a tout du jeune lion », voilà les mots de Giovanni Mirabassi, directeur du label Jazz Eleven. On fait pire comme compliment..
Et il faut dire que Mark Priore et son piano impressionnent. Il présente ce soir son album Initio accompagné de deux beaux instrumentistes Juan Villarroel à la contrebasse et Élie Martin-Charrière à la batterie, tous les deux parfaitement à l'écoute, qui vont offrir un écrin complice et dense à ses compositions.
On suit Airelle Besson depuis plusieurs années : timide débutante sur le bis de Marciac ou leader dans "Radio One" sous le chapiteau, en quartet avec "Try", ou prix d'interprétation à Jazz à la Défense, elle s'épanouit dans de multiples collaborations. On la sait capable du meilleur avec une trompette limpide, puissante ou délicate mais aussi (mauvaise humeur ou circonstance) de prestations un peu bâclées parfois, dont j'ai gardé un souvenir mitigé.
Aujourd'hui rien de tout cela. C'est à du tout bon, à de l'excellent auquel nous aurons affaire.
Cet album que va décliner le trio composé de Sébastian Sternal au piano et synthé et de Jonas Burgwinkel à la batterie s'intitule « Surprise » d'après une des ses compositions et s'en est une de surprise, belle et bonne. C'est vibrant, chantant, étonnant, imprégné d'une touchante poésie maniant avec réussite l'art du contre-pied et du décalage.
Grégory Privat est un artiste que l'on connaît bien depuis quelques années déjà. Sideman de talent, il sait se glisser sans encombres dans le style de celui ou de celle qu'il accompagne mais en y insufflant une patte reconnaissable, une couleur bien à lui. On sait qu'il est là, à travers son énergie, une inspiration renouvelée, de l'élan, de la densité et de la profondeur. Personne ne s'y est trompé d'ailleurs et les récompenses se sont accumulées, la dernière en date étant le Prix Django Reinhardt de l'Académie du Jazz en 2024.
Il faut dire qu'il est tombé dans la musique comme Obélix dans la marmite de potion magique, dès l'enfance. Son père, José Privat, étant compositeur et pianiste du groupe martiniquais Malavoi, cela génère des bases solides et lumineuses et une inspiration créole qui fait partie de ses fibres, de sa musique intérieure.
L'album qu'il présente aujourd'hui se nomme "Phoenix", comme l'oiseau qui renaît toujours de ses cendres. Et même si c'est un oiseau flamboyant et magnifique à l'image de sa musique, voilà un titre pas tout à fait approprié. Car Grégory Privat ne renaît pas de ses cendres, il n'est pas cendres à aucun moment. Je dirai plutôt qu'il s'expose, se dévoile, accepte ses complexités avec ou sans pudeur de violette, cela dépend des morceaux. C'est davantage une fleur qui s'ouvre, se découvre sur une intimité, pistils de caraïbes, efflorescences de jazz, volutes électroniques de liseron, facettes colorées, douceurs bouclées de pourpre, souvenirs mordorés de l'ailleurs quel qu'il soit.
Le Rocher de Palmer accueillait ce 14 février 2025 Nubya Garcia, une saxophoniste de jazz britannique, dans cette lignée de filles à caractère qui tracent leur route (enfin !) dans le milieu du jazz et dans celui du saxophone. Elle arrive avec un sacré pédigrée, bardée de récompenses, formée dans les plus prestigieuses écoles et est décrite comme une artiste de talent, une pépite à surveiller de près.
C'est aussi une artiste de son époque, active sur les réseaux sociaux, compositrice pour des jeux vidéos influents, collaboratrice du monde de la mode. Acclamée par la critique elle est sans doute en passe de devenir une incontournable...
Il faut dire qu'elle a pour elle de nombreuses qualités évidentes dès la première écoute : un son remarquable, vraiment beau, chaud, ample et souple; une agilité virtuose dont elle ne fait pas un étalage excessif, et une personnalité sincère, facile et souriante. Un petit bout d'énergie puissante et équilibrée. On a envie de glisser dans ses notes et de se laisser prendre très vite à son cheminement.
Elle a également la réputation de porter à travers ses compositions un syncrétisme de musique, jazz bien sûr mais aussi soul, RNB ou caraïbes, diablement désirable.
Pourtant c'est un concert d'un classicisme convenu auquel nous allons assister. Un concert court aussi, à peine une heure et quart.
Les deux premiers morceaux se déroulent sans efforts, des bannières souples, remplies de douceur, bien agréables mais ballottées d'un chant à l'autre, sans trop de distinctions ni de ruptures, avec un thème que l'on a du mal à suivre ou identifier. Une structure jazz classique, chacun y allant de son impro avec plus ou moins d'intensité : Daniel Casimir à la contrebasse, délicat et inspiré, Lyle Baron au piano plus introverti et Sam Jones à la batterie (en marcel et en bob… je ne désespère pas de voir un jour un musicien peint en bleu comme Philippe Katerine, ce serait marrant !) par moments trop présent.
L’Orchestre National de Jazz (ONJ) existe depuis 1986. Il est né de la volonté de faire rayonner le jazz français grâce à un grand orchestre subventionné par l’État et confié à un directeur sur la base de ses projets, un pendant jazz à l'Orchestre National de France.
Placée sous la direction d'un chef d'orchestre (généralement nommé pour deux à trois ans), cette formation dispose ainsi de moyens et de temps lui permettant de réaliser, diffuser et présenter ses créations à travers le monde.
Céline Bonacina est une saxophoniste rare.
Rare par la taille de l'instrument adopté, le baryton et son allure de colosse, ses rugissements dans les graves, et son aspect gigantesque qui la font paraître elle, encore plus petite et fine. Céline Bonacina est devenue depuis plusieurs années une spécialiste reconnue de cet instrument à l'aspect exceptionnel et elle trace son chemin dans un univers pluriel, renouvelé et tonique.
Elle est rare aussi par la qualité de son jeu et sa générosité non feinte. Ce soir, elle joue des morceaux de son dernier album sorti en 2023 et intitulé avec justesse JUMP.
Car du Jump il y en a. Des sauts dans des couleurs et des imaginaires diversifiés dans lesquels se mélangent une fièvre endiablée, de la brillance sans clinquant et une bonne dose de tendresse nostalgique.